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La fragilité chez le chien âgé : un facteur de risque de décès - 24/07/15

Doi : 10.1016/j.anicom.2015.06.005 
J. Hua 2, , S. Hoummady 1, C. Muller 3, M. Blondot 4, J. Pouchelon 2, C. Gilbert 1, L. Desquilbet 1
1 UMR CNRS-MNHN 7179, 4, avenue du Petit-Château, 91800 Brunoy, France 
2 École nationale vétérinaire d’Alfort - ENVA CHUVA, 7, avenue du Général-de-Gaulle, 94700 Maisons-Alfort, France 
3 Clinique vétérinaire Saint-Bernard, 59160 Lomme, France 
4 École des chiens guides pour aveugles et malvoyants de Paris, 75012 Paris, France 

Auteur correspondant.

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Résumé

Introduction

Le vieillissement chronologique (l’âge d’un individu) doit être distingué du vieillissement biologique [1]. La « fragilité » chez un individu est caractérisée par une diminution des réserves physiologiques et une augmentation de la vulnérabilité aux événements défavorables (survenue de maladies, décès…), résultant de la dérégulation de multiples systèmes physiologiques [2]. L’évaluation de la fragilité permet d’apprécier l’état du vieillissement physiologique global [1]. Le phénotype de fragilité s’évalue à partir de 5 composantes : dénutrition chronique, faible endurance, faible activité physique, faible mobilité, et faiblesse musculaire. Un individu est « fragile » s’il présente3 parmi ces 5 composantes [3]. La fragilité est étudiée chez la souris mais pas encore chez le chien domestique (Canis familiaris), bien que cette espèce ait récemment été proposée pour étudier le processus de vieillissement. Les objectifs de cette étude étaient :

– de définir de façon opérationnelle un phénotype de fragilité (PF) à partir d’une grille gériatrique (GG, [4]) remplie lors d’une consultation de gériatrie (CG) dans une école de chiens guides d’aveugles et malvoyants ;

– de montrer que la fragilité chez le chien est un facteur de risque de décès.

Matériel et méthodes

Les critères d’inclusion des chiens étaient :

– aucune donnée manquante sur les items de la GG permettant l’évaluation de la fragilité du chien ;

– ≥1 prélèvement biologique.

Pour définir le PF, 5 items issus de la GG ont été sélectionnés pour correspondre aux 5 composantes de la fragilité : alopécie nette ou en plaque (indicateur d’un état de dénutrition chronique [5]), faible tolérance à l’effort (indicateur de faible endurance), moyen ou faible niveau d’activité, démarche anormale (indicateur de faible mobilité), et diminution de la masse musculaire (indicateur de faiblesse musculaire). Le PF était présent si3 composantes étaient présentes. Les associations entre la présence du PF et la survenue de décès ont été étudiées via l’analyse de survie (estimateur de Kaplan-Meier, modèles multivariés de Cox). Les associations étaient systématiquement ajustées sur l’âge du chien. Une définition moins sévère du PF (≥2 composantes présentes) a permis d’ajuster sur d’autres expositions en plus de l’âge.

Résultats

Parmi les 116 chiens de l’étude, 50 % étaient des femelles ; 41 % étaient de race Golden Retriever, 23 % de race Labrador Retriever, 19 % croisés Golden ou Labrador Retriever, et 17 % d’autres races. L’âge médian à la CG était de 9,0ans (1er quartile [Q1]=8,5 ; 3e quartile [Q3]=9,3). Les affections présentées par les chiens étaient : troubles visuels (68 %), ≥3 nodules cutanés (15 %), troubles comportementaux (11 %), néoplasie (6 %), et troubles neurologiques (5 %). À la CG, 10 chiens (9 %) avaient présenté2 composantes de fragilité, dont 5 (4 %) en avaient présenté3. Au total, 76 chiens sont décédés après la CG, conduisant à un temps de survie médian (délai entre la CG et le décès tel que 50 % des chiens sont décédés) estimé à 4,4ans (Q1–Q3=2,9–5,2). Ce temps de survie médian différait significativement entre les chiens présentant le PF (≥3 composantes) et les autres chiens (respectivement 1,0 et 4,5ans ; p-logrank<0,01) ; le risque relatif (RR) brut comparant les chiens avec3 composantes aux autres chiens sur la survenue d’un décès valait 9,7 (intervalle de confiance [IC] à 95 %=3,7–26,0). Après ajustement sur l’âge, la présence d’un PF restait significativement associée au décès (RR=5,1 ; IC95 %=1,2–20,9 ; p=0,02). En utilisant la définition moins sévère du PF (≥2 composantes), la présence d’un PF restait significativement associée au décès, indépendamment de l’âge (RR=4,5 ; IC95 %=1,6–12,7 ; p<0,01). La prise en compte d’autres expositions en plus de l’âge telles que certains biomarqueurs (ALAT, PAL, urée), le nombre de nodules cutanés, les troubles de la cavité buccale (tartre, gingivite, parodontite), visuels, neurologiques, ou comportementaux, la race, le sexe, et la présence de néoplasie, ne remettait pas en cause la significativité de l’association entre le fait de présenter2 composantes de fragilité et la survenue d’un décès.

Discussion

Les résultats de l’étude montrent que la fragilité, un concept développé en gérontologie humaine, semble adaptée au modèle canin. Évaluer les 5 composantes de la fragilité par questionnaire est une procédure simple et rapide, qui permet de déceler des chiens avec un risque important de décéder rapidement, indépendamment de leur âge. Les interventions permettant de repousser la date d’apparition de signes de fragilité chez l’homme pourraient ainsi être testées chez le chien. La faible prévalence de la fragilité nous ayant empêchés de vérifier cette association séparément pour chaque race de l’échantillon, d’autres études sont nécessaires pour valider ce PF pour d’autres races de chiens.

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Vol 50 - N° 2

P. 73-74 - avril 2015 Retour au numéro
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